Le sang dégouline sur les lèvres tout sourire de l’innocent
Tout ce que je suis est passé, en moi futur, présent seulement dans mes moments fugaces. Cela s’éveille puis s’achève en un point infinitif. Que faire d’autre que contempler ingénument le génie efférent, qui m’aspire loin de moi? Et moi, qui aspire de mes bouches béantes la lie, le fracas des ondes, l’évènement roide, à l’immuable, aux essors sidérés, aux silences fous. Rarement je vois mon olfaction factice inspirer la vastité des actes, les magnitudes d’autres lieux, des substances émanées, les mannes des Hommes, leurs précipices infondus, non non, je précipite mes muscles à expirer l’engonflement, les tensions, revenant, indubitable, vers les refuges du stupre morbide, turbide et si vide. D’opulence j’enthère mes soliloques modiques, d’une promesse éperdue d’avance, rampant sur les remparts sonores de l’erreur, me pendant aux échafaudages flambants d’échardes que j’enceins, laisse s’incorporer, regarde tendrement, une larme de miel coulant sur mes joues bulbeuses, comme on regarde le cliché d’une écharpe d’iris. Mais vous, biglez d’une pupille écornée ces petits astres nains; vous ciblerez habilement les tromperies de l’éléphant, ce bistre géant, repu de sédiments sédatifs, autrement séditieux. Mon mot, mon mal; je tonds le son, le sens, jusqu’à l’évidance, et je laisse choir le tout par terre, comme un éponge sèche. Zombie, satyre, véreux de vers crevés, narcisse minuscule, rimbaldieunuque, sartriqué, camusqueux, kundérisoire, nietzscheux, pseudo-pseudo; de mes milles faux je me descends à fond, là où toutes fois perdu(es) je m’aime. Voyez plus tôt, j’ai l’instinct de vie entre parenthèses, ha! Sobjectivité… Mot-valise où je fourre tout. C’est que ma tete est sans accent. Jouer. Jouir. Joute. «Dis donc, l’enfant au grand cahier, trouve-toi un jumeau avant d’oser! Ostracise-toi des temples, trouve ailleurs la vie!» - «…» - «Oui oui, quand il sera grand, il osera creuser son trou, d’un culot grandiose. En attendant, il fera son temps. Que voulez-vous, il s’accroche aux bouches, et double son cynisme!» - «Que le monde serait beau sans ironie!» Ha Ha Ha! Te rappelles-tu, lecteur primordial, juge de premier ordre, ordure (permet moi d’ordurcir, en bonne ordure que je suis!)? Donne-moi ta pitié, cette si sublime cotisation; minabilise-moi jusqu’à la vermine; entame-moi des superbes éclats de ta risée bleu-sang, ceux des principicules noblaillons, replets de volonté! Ahhhh! J’entends déjà mon croulement, je sens déjà ma morgoulinance déborder en deçà des surfaces, et ascendre, comme les dieux, sur les cimes abîmées! Abîmez-moi, engouffrez-moi! Fortes têtes, descendez avec moi dans le tréfonds, terrassez mon fief de griffes de vos tettes déterrées; inondez mes pays rébarbatifs de vos océans implacables, fourmillants de vie; venez sous mes voûtes sans cieux avec vos nimbus gorgées de moissons; faites-y éclore les lotus noirs, les ophrys carnivores, les lys parasites immensément nauséabondes, toutes ces fleurs du mal desquelles je boirai les sèves fielleuses, banne de ma verve, issues de mes regs vénéneux, ingurgitateurs d’eaux ternes, ni si bonnes ni si mauvaises, promulgateurs de vases enrichies, ces végétaux férins qui m’enchevêtreront dans leurs lianes spinescentes, que je puisse jouir de mon mauvais sang précieux. Noyez mon antre des orages d’une saison infernale, que je devienne protée, fils du Triton, pâtre des horreurs abyssales, le fugitif qui esquivera toutes vos questions par des vernis vaniteux. Lapidez-moi ensuite, vous qui ne pêchez jamais dans les fleuves inertes du trépas, les seuls pécheurs, et offrez-moi une couronne d’épines argentées; polissez cet auguste bijou translucide de vos moellons rugueux, que je puisse à jamais siéger en despote au sommet de mon infime infini, roi veuf de ma vieille vie vaguant vers sa visée fatale. Je suis Tout. Tout se paie cher. Chère m’est la valeur. Ma valeur est infinie. L’infini sans valeur. Je suis Rien. Mais je ris, grisé par la brume, cette brumaille qui se dérobe à l’étreinte des êtres.
Le temps bleu s’allongeait vers les murs sans issue, chaque seconde que je buvais m’amenait dans de somptueux palais où moi, clochard ouaté, défroqué de ses parures, je m’épanchais en roi déchu. Je fus prince, je fus l’unique, je fus poète, fils du destin, je fus le chat botté, admiré, l’illusoire préciosité d’un simoun déserteur, de curieuses blondeurs curieuses, des ciels naïfs, des douceurs mélancoliques, d’héroïnes aguerries, des lunescences. D’intelligences d’un troisième type. Tapé par le subit mutisme, je me calque, nu, à l’être occulte, à recycler mauvaises motions, retrouvant les maux motivés de noms mortifiés, m’affalant aux pieds de mon trône indigéant sans autre couronne que ces flots qui me gonflent. Je pus, me rue sur mon rut innndééfffini et de petits textiles lisses tisse les formules de mes carences.
Mon art est un art de sous-sol, de vieux recoin miteux de bibliothèque miteuse, un art de la grotte humide, un art pariétal des mangroves modernes. Mon art est une parfaite exécration des plus communes choses, des vertus répandues, des relents dissimulés en deçà des arômes anodins. Mon art épouse la laideur dans ses moindres recoins et s’engage à l’abhorrer jusqu’à ce que la mort les unisse. Mon art est un art de l’égout, qui attend les déluges d’une soif dantesque, pour s’étancher des curures exubérantes d’hommeries. Mon art placarde de l’immonde, de l’odieux, de l’infect, comme une mixture émolliente, sur la rigueur d’exister. Mon art célèbre l’écœurement, décompose le génial, mitraille les velours, délite même les regs. Mon art est le dernier appel entendu lorsque nous sommes au sommet des falaises.
Le sens de la vie est une expression de longue haleine
Concassée à même le phrasé des pendules haineux
La mort nous parle, et nous rétorquons
La mort interpelle le plus haut de nos points
Au plus haut faîte du plus distant lointain
Là où nous savons que tout nous ignorons
On pourra me jeter mille tunnels au visage
Comme mille faisceaux de vomi d’éclairage
Je n’en verrai que l’ambulante éloquence des bibles
Diluée dans les milliards de tous les possibles
La pourriture qui infuse en mon sang
Dans ce bain fait de toutes mes relations ratées
Cette pourriture est décisive et suprême
Elle est ce que je serai sur mon grabat de clamseur
Et d’aller à la ligne je m’engonce de splendide
Idoine que pour les rats, les chacals et les vautours
Que l’on soit les régnants des royaumes que nous pouvons
Que l’on soit les sculpteurs de nos sépulcres oubliés
Tout pourrait être gracieux et placide, et cela même en ton absence
Mais tout est nocturne et paresse, quand l’insonore fait son offrande
Reviens pour engloutir l’incendie et friper l’indicible de sapience
Pour achever ta frelaterie sur la tendresse de mes viandes
Viens vite exécrer
Viens, l’ange, me justifier
Toi qui jamais ne comprendrais
De quel cuir je suis fait
L’ennui
Le vice
L’imposteur
L’envie
La rudesse
Le grondeur
La folie
Le précipice
Du glandeur
Le cri
L’ivresse
De l’aigreur
Là-bas, loin des combes, âcre est l’eau des caverneux océans
Je suis eux et sur eux j’onde, ramant parmi les hauts-néants
J’y éradiquerai l’heur hors de mon air
J’attendrai que m’enclosent les filons pélagiens
Répondrai en dernier belluaire des armées hadales au Protée neptunien
Vas vite m’oublier
Vas, l’ange, abandonner
Toi qui jamais ne mangerais
De cette fibre dont je suis fait
C’est ton amuïssement fluide qui mugit et meuble le vide
Quand je me suis lucide
Rien à envier aux autres
Rien que les autres puissent envier
Le nul, le neutre, se vautre
Dans le secret de ses journées
Il aimerait vouloir faire chemin
Aux côtés de toute jouissance
Mais se sait orgueilleusement contraint
À l’étroitesse de ses mouvances
Sur une flaque il fait son île impeuplée
Et y plante aimablement sa centaurée
Et face aux bienheureux sa main se gante
Comme face à des marionnettes distantes
Il est l’amphore sans fond
La faim sans fin, le for sans nom
Lui qui se détruit, qui languit, qui se largue, s’évide et s’évince
Lui qui se vainc, s’éviscère, s’avachit, lui dont la langue grince
Lui qui sur ses chairs s’acharne, lui qui s’en arrache tout le rêche
Lui qui vit avili, lui qui vote, lui qui vivote, lui qui prêche
Lui qui fuit toute brèche de peur de n’être assez malin
Lui qui veut vouloir avoir envie d’avoir fini de vivre enfin
D’une flèche d’airain romps ton fatum, totem imbu bulleux du cul
Cul-de-sac sur pattes, ne saccage pas les carapaces des perdus
Toi, sac à gages perdues d’avance, dont la carcasse est noire d’exsangue
Suis tes tortues sans que devancent tes pas sénestres nos pas ingambes
Sois gauche avec droiture pour que s’espacent tes tortures
Et que sur ta grise épitaphe puissent lire en chœur ceux qui piaffent:
Sur mon trône
Sous mon dôme
Je suis l’ombre
Jamais comblée
J’ai contre l’amour une dent bien aiguisée
Pour le croquer bien saignant
Pour l’empaler dans l’écran
À contre-courant des discours melliflus
À l’aval des concours de circonstance trop aisés
J’ai pour le mensonge un amour bien sablé
Lisse à glisser sur le roc gibbeux
Tout comme Icare prêt à prendre les nues
Près du dernier grand creux
Et sa soleilleuse embardée
L’amphigourique étoile embrase les plumes de l’espoir inflammable
J’ai une fièvre au sein de l’œil
Qui ploie, qui bruisse, qui broie, qui crisse
Comme la vaguelette contre l’écueil
Ou un rai de soleil endeuillé
S’impose à moi l’hiératique
Transe aiguë du névropathe
Ce schéol divinement bath
Que les hidalgos se trafiquent
Singeons maladroitement les minauderies des sigisbées
S’escrimant à bien atteindre les fines pointes des barathres
Mouettes, pigeons et gypaètes nous en sauront bientôt gré
D’ainsi déclencher le rouage de la charognerie des marâtres
J’étais jadis le misérable abstème de l’amour
Qui en éludait les excès par de spécieux détours
Parangon de tartuferie
D’une vile gamberge et plein d’envies
J’excellais dans les cacades
Que je masquais en bath bravades
Car de mes fumées imbu
Je courais sus à d’vioques dahus
Prescrits par mon malpropre désir
De sûrement sur toutes choses médire
Mais bien, voilà, un bien beau jour
Alors qu’une friche je parcours
Qui ne vois-je, et comment, là, au beau milieu des cirses?
C’était bien lui, le dieu villeux… mais sans son thyrse!
« Satyre! – m’v’là qu’lui dis-je
D’un ton railleur, sans ambages –
Te v’là comme l’aigle sans ses rémiges
Ou l’almée sans son effeuillage!
Comment comptes-tu maintenant voler?!
Qui donc voudra par toi danser?!
Et le fier Tudieu de m’répondre, d’un rire glacial d’immortel
«Fieffé félon, amant des formes,
Boudant bas-fonds, pris de vertiges
Piètre sigisbée des gentes dames mal fêlées
Sache qu’il n’y a qu’un homoncule qui, ne sachant marcher
S’égarerait à béer être vêtu de plumes, duvets et ailes
Et qu’un véritable danseur se préoccupera davantage
De danser que de séduire ton engeance digne de ma diasyrme!»
Sous cette sentence sans rémission
J’allai déposer mon pardon
Au seuil de mon vieil augure
J’avais maintenant une haine mûre
Exfoliée de tout dévoiement
Et prête à trahir les rangs
D’haïr l’amour je pourrissais?
Je pouvais d’ores aimer la haine!
Et m’en remettre à son élan
Je romprai tous les carcans
Subjuguerai toutes les géhennes
Et assécherai jusqu’au buissaies
Mes lèvres et mes yeux ont baisé et fixé les plus vastes dégoûts et les plus amères misères. Les plaintes coulées dans le tremblement des peurs ont lentement érodé mes mousses et rendu limpide ma peau caillouteuse, m’ont rendu aux duretés les plus froides, aux détestations les plus sereines. Je pourrais vivre sans rien, je pourrai vivre avec tout, et mêmement être l’irréconciliable parmi les irréconciliés, l’inconsolable parmi les inconsolés, le plus content des contempteurs, le plus satisfait des insatisfaits. Et quand l’euphorie faite femme, ce riche et millénaire poison, se présente sous mon aile décharnée de vampire, et qu’au nom des plus illustres lettres, celles qui s’habillent de noblesse, elle compte m’offrir les plumes de l’aigle, pour que dans mes serres j’égorge le serpent, je lui réponds d’une voix inaudible, que le serpent sera toujours mon ami, et qu’aux amples envolées des sentiments les plus faux je préfère de loin les furtifs battements d’aile qui saluent la lune et les calendes transies, et leurs laideurs les plus tues.
Je maintiendrai la façade jusqu'à la raréfaction himalayenne de l'air qui me fait vivoter, jusqu'à ce que chaque inspiration soit une conflagration des voies nasales, non pas d'être si haut par-dessus le caprice indifférent des mers, mais d'être si profond dedans les entrailles des planètes. Je calcinerai mon cœur jusqu’au charbon, pour l’indurer de pesant jusqu’au diamant, pour taillader ma propre armure, et que ses cicatrices soient l'esbroufe qui narguera les futurs cuisants. Toute la dégueulasserie du monde tiendra dans ma main d’inculte, et j’en presserai tout le pus pour ensuite en larguer la bagasse en plein au visage de ma race infecte. Ma rancœur formidable retentira sur les parois de tous les tumultes mal aérés, et je la cultiverai jusqu’en ce que j’en crève d’aversion.
Qui est qui, qui est quoi
Pour dire de mon existence
Qu'elle est ci, qu'elle est ça?
Qu'elle soit chienne et soumise
Qu'elle soit chatte et sournoise
Je suis l'animal qui devra mordre dedans
Et qui bêtement s'y cassera les dents
Ma vie, ma vie dure
Ma vie lourde, ma vie longue
Étrangère aux limites qui dupent
Ancrée furieusement à la carne foutue des os
Ma vie qui méprise les vérités, qui sont toujours celles d'autrui
Ma vie qui s'éprend de la méprise, si personnelle et brutale
Ma vie! Et non l'autre
Mon tricycle pétrifié
Mes battements effarés
Le son des enfants
Libres, jouant
La moue de mon père
Sa voix d’homme amer
Son visage rasé
Mes nerfs remués
Mon ami turpide
Qui marmonne «stupide»
La lèvre à demi close
Aussi lâche que morose
Les distances de ma mère
Partie vers d’autres terres
Mon école solitaire
Mes jouets salutaires
La ceinture de papa
Qui sur moi s’abat
Et l’éclat de ma rage
Et les paroles qui ravagent
Mes racines arrachées
Mes origines aliénées
Les nouvelles cités hostiles
Ma solitude immobile
Les douleurs incolores me pincent
Exiguës, m’évincent des dehors
Je m’ennuie des ennuis qui rincent l’œil d’ubiquismes ubuesques
Réparons ce corps, que je le re-pare de mes panaches grotesques
Et alors que d’un gauche doigté
J’abaisse mes droitures affaissées
J’encaisse le choc d’une culture désossée
Pauvres de mes rimes
Le calme s’échappe en deuil par les portes de mon œil
Et d’effroyables sillons tout mous aveuglent mon présent perclus
J’inspire le temps par petites gouttes interminables
J’aspire au vent car ses rites veloutent l’ineffaçable
Je mire l’étang et ses mythes-moumoutes imperméables
Le gisement s’enfuit par les portes du sommeil
Et je chute en déchirant la nuit
Réveillé dans le feu calme
Désirant, suppliant la vie
Si on, si on, si on
Mort, fondu, j’aimerais être, pour plus ne me morfondre de supplices
Coupé de mon ente
Fermé de mes pores
Sentant les fenêtres m’arracher à mon air
Je déborde, sursature, que puis-je donc faire?
Les dormantes lumières
Se meurent à nouveau
Arches transparentes
Soleils au dehors
Réapprenant à vivre sous les corps diurnes
Je me tords dans une danse salace, taciturne
Seuil de la terre
Ultime caveau
Hideur évanescente
Roupille sans effort
Roulant ses rochers bestiaux sur les briques
Sentant les cordes de fiel qui l’étriquent
De sable s’aère
Vacille sans eau
Je suis l’aride
Je suis le pas mouillé
Je suis celui qui ne plonge jamais
Je suis le caractère des déserts
Je suis le solitaire définitif
Je suis l’inabsorbé des troupeaux
Je suis l’ingérable et l’ingéré
L’iningérable et l’inguérissable
Je suis l’incroyant parmi les malades
Le lacrymogène pour mégères inextirpables
J’ai une dent qui s’affile au contact des larmes que j’ai trop souvent bues
J’ai une main de bronze qui feint de se refermer sur une âme en cristal
Et puisqu’il me faut subsister endéans du langage
Dans ce piètre cachot hanté d’anthropophages
Que ça soit pour célébrer la perpétuelle mystification verbale
Et pour voir à moi se lover jusqu’à l’asphyxie les belles, naïves sangsues
Raptus
Formules textiles par grand froid
Au sommet des falaises
Le phrasé des pendules haineux
Sur mon grabat de clamseur
Quand je me suis lucide
Croque-la-mort
La transe aiguë du névropathe
Autruictomie
Le mutile-haine
Les laideurs les plus tues
De la pureté
Non
Sous-souvenirs
5 nuits de luxe
L'ultime caveau
Bilemmes
Mord à l'oreille
Les monstres naissent dans les estomacs ulcérés, à l'abri des inconsciences exaucées dont ils seront les saccageurs.
Les monstres puisent leur cruauté dans les brûlures des biles surabondantes, et leur aimance dans les baumes qu’ensuite ils enduiront.
Les monstres seront toujours innocents, d’être des monstres et non des hommes.