La geôle des galériens s'étend à perte de vue
Le nœud que nous sommes
Les cris que l’on foule
Les faix qui nous assomment
Les fonds que l’on refoule
Scrute ce que je sais
Tout ce qu’à peine j’effleure
Sens tout ce que tu es
Avant que tout ne meure
Laisse se dérober le tout sous la main du ventriloque
S’embarbouiller dans les rapides formels des époques
Enfin, sur les crêtes qui dévalent à la perte
Les vagues nous avalent de leurs blandices disertes
Nous
Romps & croule
Les grimaces sont ores défraîchies
Tu as l’arcane de tous les précipices
Que seul l’œil d’un rayon saurait percer
Tes sylphes se laissent emporter par les courants
Et tu voudras toujours d’un ailleurs où je ne serai pas
Je pourrais te perdre à l’espace d’un instant
De si proche, te perdre à quelque chose de lointain
À des rêves qui ne pourront jamais dérailler
Par des accès qui feront toujours déraper
Le réel sera cruel et nous-mêmes imparfaits
Mais on attendra la fin du monde, dépouillés et ensemble
Nos mains enchaînées, comme deux planètes entraînées
Par la force des choses, dans la vacance qui nous unit
C’est ainsi que le rêveur attend, aux portes verrouillées
Et couronne d'espoir son invariable inaction
L'adulte croit, au pouvoir de sa vie
À la profondeur de son cran, taillé à l’égoïne
Mes chaleurs m’écrasent
Les tiennes t’enveloppent
Quand les miennes se salent les tiennes se sucrent
Nos langues façonnent chacune un dialecte
Dont nos cuirs ensuite se vêtent
Pour exiler d’entre nous l’hiver des dissemblances
Nos deux fronts marbrés se tiennent tête
Jusqu’à ce que les frictions stoppent
Et que les éruptions inondent les rues de trublions
Calorifère et mouture d'ocre
Aller-simple
J'irai seul, là où tous iront
J'irai seul là où tous auraient pu aller
J'irai disloquer mes derniers phébus
Et mystifier les argus de mes morphèmes famés
J'irai seul et feutré et à jamais
M’évader des bastringues tropicaux
Vers la fraîche densité de tes bras fuligineux
Pour encoder dans tes cendres ma houle rubescente
Pour décorer ta pénombre de saturne
Et de matité livide
Je fais souvent cette trêve étrange et enivrante
Avec une inconnue toute femme dont j'aime qu'en elle elle m’aime
Et qui n’est à chaque fois ni toute faite d’une même
Ni toute faite d’une autre que je pourrais aimer mêmement
Tu t'épanches comme le lierre
Au-dessus des limons qui étanchent la soif des vers
Tu enclenches le chant des chairs
Pour ceux qui comme moi flanchent face aux insolences altières
Je m’accole aux grands troncs
Les enlace et m’y fonds
Solide comme Samson
Comme le désir que nous nouons grâce au gréement de ce galion
À bord duquel nous voguons
C'est de glace que je me hisse en ton noyau pour qu'y sertisse son joyau la Némésis de tous mes maux
Vol de vers en laine*
Aube à baumes
Dans le matin il y a le vœu et le génie, et l’aiguail, et la peau qui fraîchit, et le butin de la nuit ceinturant nos ardeurs, et les batailles que nous perdîmes.
Dans le matin il y a toi, le regard fermé sur tes songes, et il y a mes yeux hagards ancrés à ton silence palustre.
Car dans le matin s’affairent les légendes, s’entassent les espérances, s’époumonent les volontés, subsiste l'ersatz de ce qui fait croire aux impossibles, devant l'impassible joug du jour aux exigences d'acier.
Le restant de petit feu
Qui en toi pour moi crépite
Cédera tôt ou trop tard
Les vêpres froides frétillent de mots
Et tu t’y drapes de confidences
Pour contenir le flux des flots
Et préserver notre jouvence
Les vices de véracité
Versent dans l’avarice de cécité
Ton grands corps que j’escalade
Mu par ma faim sauvage
Tes longueurs qui m’étirent
Nourri de tes parfums
Souviens-toi du plaisir à l’envers
De l’absence de besoin
De l’esseulement de la tâche
Et l’isolement du courage
Empanache-toi des violences
Et vas, vis-à-vis la vie
L'avis pour toi
Tout recommence, les clepsydres déchargent leurs jours tépides sur les avenues qui craquellent, les asphaltes imprégnées puent les Je, en arborent les transes, peuvent tout dire sauf l'autre et l’autrui et l'artère et la vie.
L'idiolithe
Apologie du loser
La route du perdant n’est pas celle de l’échec
Ni celle du fracas, ni de l’opprobre en trombe
Ce n’est pas le genou qui ploie sous les poids extrinsèques
C’est le silence immobile des ombres
La route du perdant n'est pas celle du perdu
Qui perdure et rumine et mûrit sa recherche
Ce n'est pas la digestion ardue du bisulque
C'est le stérile ressassement des brèches
J’ai aujourd’hui inventé une nouvelle machine
Faite de lactescence métallique et de blondeur assassine
Et sur elle j’ai gravé de la nervure et de la venaison
Planté du duvet et de la trépidation
Sur son anatomie primitive j’ai inscrit ma luxure sublimée
Comme de la buée entre deux corps, pour flouer les intervalles
Pour terminer d’articuler les horizons en cavale
Et d’une seule chaîne les condamner
La machine, sans raison, cavalcade sans moi maintenant
Étrennant la négation dont je suis le moribond existant
Sur des routes achalandées, sous la liesse des modestes
Qui ignorent qui je suis, et qui donc me détestent
Au-dessus de mon fronton j’ai raccroché mon sanglot
Tel un pendu dont on aurait lynché l’éclat de rire par méprise
Et dès que le vent se lève on entend se taire son trémolo
De peur d’invoquer la machine qui se fit amie de la brise
Cathos & Plurielle
Je suis une erreur du hasard
Et donc une pure vérité
La pureté est une balle
Qui vous éclate la cervelle
Le dépit brûlé habille mon écorce
Et son fraisil me fait fertile et nouveau
La plante qui croît fait un presque-pas vers le dehors
Mais finit par s'étouffer dans son bourgeon
La sujétion aux Escalators étaye notre bonheur
Nous qui cadenassons nos pas dans l'abri des lenteurs
Ainsi je peux sentir, être toute la palette
Surfer de long en large sur l'arc-en-ciel obscène du zeitgeist
Envier, médire, honnir, mendier
Pour que le matin venu, toujours, je m'endorme
Et toi qui m'aimes parce que je te fais naviguer
Ne fût-ce que sur des coulées de lave
Comprends que moi je t'aime parce que tu m'empêches de couler
Et que j'ai le grand amour des épaves
J’écrirai jusqu'à ce que le sommeil roux me happe
Par la trouille du lisse et l'angoisse du sans-relief
Parce que de l'abîme relève et que la sombreur révèle
Parce que la profondeur élève même le lutin
Hello trop
L’autre est un ressentiment irréconciliable
Pour celui qui ne peut que pour lui chose faire
De l’autre ne peut valoir que l’amour d’un frère
Ou ne rien valoir du tout
Pour l’inconsolable brouillé, tombé de ses nues
Nu face au miroir
Kinship
Souviens-toi
Là où tu défais ton nœud
Souviens t’en!
Là où la matière crie au feu
Je chasserai l’endroit où évacuer
Liquider à jamais les fureurs
M’extrayant du tout-aqueux
Jusqu’au fer terreux
Faire! Et non Fuir!
Je suis l’étalon géant
Qui de son immense cor
Fait vrombir l’or des néants